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Nous avons rencontré Yves
Mériel-Bussy à Ploudalmézeau où il possède sa demeure et son atelier,
quelques jours avant les Floralies auxquelles il participe bénévolement en
décorant des stands ou en organisant un concours de peinture. Les Floralies de
Ploudalmézeau attirent chaque année plus de 15.000 personnes.
LE MAGAZINE. - Votre père
était lui-même peintre. Sa profession a-t-elle eu une influence primordiale
sur votre carrière?
Yves Mériel-Bussy. - Sans
doute. Ce sont les impressions olfactives qui ont tout déclenché :
l'odeur de la peinture, les couleurs, les objets, les mots..
Vers 14 ans je ne voulais
faire que de la peinture. Mon père m'a dit l'éternelle phrase : "Le bac,
passe ton bac". Ensuite, vers 18-19 ans j'ai voulu faire les
Beaux-Arts. Il m'a dit : "Les Beaux-Arts d'accord mais le professorat". J'ai donc fait le professorat de dessin et parallèlement les Beaux-Arts
de Paris. Mais il ne fallait surtout pas dire aux Beaux Arts de Paris que l'on
était professeur. C'était très mal vu. Il fallait aussi le taire aux
galeries et aux marchands de tableaux. Maintenant, heureusement ça a changé.
L-M. - A-t-il influencé votre
peinture ?
Y.M-B. - Mon père s'est
toujours gardé de me donner des conseils de peur de m'influencer. Quand j’étais
enfant, il punaisait dans son atelier le dessin que j'avais réussi. Ca voulait
tout dire.
Après, il m'a donné des
conseils techniques, ce qu'il fallait acheter comme matériel, mais c'est tout.
Je me suis débrouillé tout seul.
On me dit quelque fois :
"Ah ça me rappelle un peu la peinture de votre père". Et c'est
souvent pour des portraits féminins, des figures. Je crois sincèrement qu'en
tant qu'hommes, on a ressenti la femme de la même façon mais on l'a peinte
chacun à notre manière. Et c'est peut-être cela que les gens ressentent dans
ma peinture lorsque je fais des personnages féminins.
L-M. - Et vous la ressentez
comment cette femme ?
Y.M-B.- -Certains peintres
aiment les femmes épanouies comme on dit gentiment ? C'est joli
d'ailleurs comme nom. Moi j'aime le moment où elle s'apprête à quitter
l'adolescence. C'est celui où la femme est la plus belle. C'est un peu comme la
toile vierge, tout peut encore arriver. C'est vrai que l'on ne sait pas comment
mais justement c'est ça qu'il y a de formidable... Une fois qu'elle est
accomplie, la femme, c'est comme la toile, c'est fini, on ne peut plus la
changer...
L-M. - Quels paysages vous
inspirent ?
Y.M-B. - J'aime beaucoup
les paysages d'ici. On dit souvent que d'aller en Provence ce doit être
formidable. Mais pour moi, la Provence, c'est juste la sieste et le pastis.
Je suis beaucoup plus
sensible aux coins d'ici. Je n'ai pas de cliché en tête pour la Bretagne. Pour
moi la Bretagne bouge. Elle n'est ni grise, ni sombre, ni dure. Elle est aussi
bien douce, sensible que brutale.
L-M. - Vous avez
différentes façons de peindre des paysages ?
Y.M-B. - Il y a des huiles
et deux sortes d'aquarelles, celles que je peins avec mes yeux et celles que je
peins avec mon cœur.
Il y a les aquarelles
classiques que je peins sur place et qui me procurent parfois une sensation
formidable de prise de possession du paysage.
Ce qui est fantastique
aussi lorsqu'on est dehors, c'est ce que j'appelle des aquarelles vivantes,
sonores. Ca m'est arrivé un jour à Portsall. Je peignais le port et il y avait
une fête foraine. Sur le moment je n'ai pas fait attention. Avant je
n'entendais que les mouettes et puis il y a eu les bruits de la fête et je me
suis pris à faire sans le vouloir plein de petits personnages colorés devant
la jetée. Ce n'est pas simplement la vision des gens qui circulaient. C'était
tout le côté fête qui m'arrivait dans les oreilles. Là ce n'est même plus
le peintre qui travaille. C'est davantage l'homme avec simplement la main qui
bouge et l'œil qui regarde.
Et puis il y a les aquarelles que je fais à la manière des huiles dans mon
atelier.
Pierre-Yves
Collinet
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